Du cynisme et de l’importance d’habiller un titre.

-Moi c’est Tanya.
-Enchanté, Danielle.
-Pas Danielle, Tanya.

« Pourquoi? », tu me demandes. Je ne sais pas. Mais je suis pourtant certaine que je prononce bien mon propre prénom depuis le début.

***

Mon ami Louis jugera peut-être mon titre, qui lui rappellera ceux des mémoires de maîtrise qui traînent à la bibliothèque de l’université. C’est lui qui l’a dit. Mais j’aime ben ça, moi, écrire un petit titre pompeux de temps en temps. C’est classique, et ça me donne un air intelligent. C’est comme un foulard qu’on agence avec un beau jeans ou un pantalon sport, comme dirait ma mère. J’aime ça, mettre un petit titre habillé en haut de mon texte sport. Et si ma conclusion est une bottine en cuir, j’ai presque l’air d’avoir écrit quelque chose d’intéressant.

Au Cégep, j’ai gagné un concours de poésie. Je venais de lire Ainsi parlait Zarathoustra sans trop comprendre, mais les discours m’avaient inspiré un titre habillé : De la nuit. Les juges ont dû se dire que j’étais pas mal fancy pour une cégépienne. Ceci étant dit, on ne portait pas de foulards à l’époque, mais plutôt des chemises à carreaux aux manches coupées en se disant que Longueuil c’était un peu comme Seattle, alors la métaphore ne fonctionne pas. Disons alors que mon titre était un petit collier de la boutique Inca qui m’a valu la publication de mon poème dans le journal étudiant. La preuve qu’un titre bien choisi peut nous mener très, très loin.

Oui, je suis cynique, et je ne me soigne pas tellement. Cynique, mais pas amère. C’est moi la fille qui sauve les mouches dans la piscine, en été. Je suis spéciale comme ça.

Je ne sais pas à quel moment on passe de l’autre côté de la force, où nos observations sur ce qui agace deviennent des commentaires sifflés entre les dents qui sucent tout l’air d’une pièce et qui finissent par un « en tout cas » sans appel. (Cue le proverbial « Poser la question c’est y répondre ». D’accord, je suce peut-être l’air des fleurs bleues. Mais je pense que c’est correct de les étourdir un peu.) D’ici là, je ne me soigne pas. Tant qu’il y aura le calendrier de Justin Trudeau et des gens qui ne savent pas qu’on doit faire face aux portes dans un wagon de métro, tant qu’à l’épicerie on me fera saigner les oreilles avec du pop adulte où la saxophone ne mérite pas d’être au masculin, et aussi longtemps qu’on continuera d’utiliser le verbe « vitaminer », vous pourrez compter sur moi. Baby, I’m your man. (Attends, y’avait-tu de la saxophone dans cette chanson-là?)

On parlait de quoi, déjà? De cynisme et d’accessoires.

Donc, je suis cynique et je porte souvent des foulards. J’aime aussi les bottines. Je ne sais pas ce que ça fait de moi. Peut-être quelqu’un de presque intéressant qui s’appellerait Danielle.

Une chose est certaine, je promets de ne jamais utiliser les adjectifs « ludique » et « festif ». Sérieux, tout le monde, on arrête ça.

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